Une enquête mondiale menée en 2024 dans 12 pays par IPSOS pour l’Institut français révèle que 53 % des non-francophones jugent le français difficile à apprendre. Il est vrai que la langue de Molière possède des règles assez singulières pour un non-locuteur natif. La prononciation, par exemple, est particulièrement ardue pour ceux qui parlent des langues non latines. Nous avons décidé de passer en revue les difficultés les plus courantes auxquelles sont confrontés les étrangers.
Plan de l'article
- Les difficultés phonétiques propres à la langue française
- Les obstacles liés à la grammaire et à la conjugaison
- Les problèmes de motivation et d’engagement des apprenants
- L’impact des différences culturelles sur l’apprentissage du FLE
- L’intégration de ressources pédagogiques numériques pour surmonter les blocages
Les difficultés phonétiques propres à la langue française
Les problèmes de prononciation varient en fonction de la langue maternelle des apprenants. Ces derniers transfèrent de manière instinctive leur système de voyelles et de consonnes sur le français. Un anglophone aura tendance à buter sur la voyelle « u » du mot « tu ». L’anglais n’ayant pas ce son, l’apprenant produira naturellement un « ou ». Les voyelles nasales (an, in, on) lui posent le même type de difficulté. Il les dénasalise en ajoutant un « n » distinct, transformant « pain » en « pa-in » avec deux syllabes.
Les locuteurs arabophones rencontrent différents obstacles, mais tout aussi systématiques. Ils confondent par exemple « p » et « b » parce que l’arabe ne distingue pas ces deux consonnes. Ils diront ainsi « bain » au lieu de « pain », « bort » au lieu de « port ». S’inscrire dans une école de langues aide précisément à contourner ces écueils grâce à des exercices ciblés. Les enseignants corrigent les erreurs et proposent des entraînements auditifs qui permettent d’améliorer la prononciation dès les premières semaines.
À cela s’ajoute un système de prononciation assez complexe. Le français ne suit pas une logique stricte, comme en espagnol ou en italien. Une même combinaison de lettres se prononce de diverses façons. Un même son s’écrit également parfois de multiples manières. Cette opacité orthographique déroute les apprenants habitués à des règles phonétiques plus transparentes.
Les obstacles liés à la grammaire et à la conjugaison
Lorsqu’un étudiant s’attaque à la grammaire française, il découvre vite que certaines règles semblent contraires au bon sens. Le subjonctif est un exemple marquant. Dans des langues comme l’anglais ou l’allemand, l’équivalent n’a pas le même poids dans l’expression quotidienne. Un anglophone peine à comprendre pourquoi il doit dire « il faut que je vienne » plutôt que « je viens », alors que les deux phrases paraissent proches en signification. Ce décalage ralentit la production spontanée, car l’étudiant réfléchit trop longtemps au choix du mode verbal au lieu de se concentrer sur le contenu de son message.
Un autre point sensible concerne l’accord du participe passé avec l’auxiliaire « avoir ». Beaucoup de non-francophones n’ont jamais rencontré une règle comparable dans leur langue. Dire « j’ai mangé les pommes que j’ai cueillies » suppose de marquer un accord avec un complément placé avant le verbe. Cette exigence apparaît arbitraire et surcharge la mémoire de l’étudiant, qui doit en même temps organiser son discours. Face à cette règle, l’élan naturel se brise et la fluidité de l’échange en pâtit.
Ces particularités grammaticales ne sont pas seulement des obstacles scolaires. Elles freinent l’expression orale dans les interactions quotidiennes. L’étudiant hésite, corrige en cours de route, et finit par éviter certaines structures pour ne pas se tromper. Cette autocensure crée une communication appauvrie, bien éloignée de la richesse qu’il vise au départ.
Les problèmes de motivation et d’engagement des apprenants
Pendant l’apprentissage d’une nouvelle langue, l’enthousiasme des premiers mois laisse parfois place à une impression de stagnation. Après avoir acquis les bases nécessaires pour saluer, se présenter et échanger quelques phrases simples, il n’est pas rare de constater que ses progrès deviennent moins visibles. L’investissement en temps ne se traduit plus par une amélioration nette de ses compétences orales.
Cette situation entraîne souvent un décrochage. L’élève assiste moins régulièrement aux cours, remet ses devoirs à plus tard ou abandonne les exercices d’écoute. Derrière ce relâchement se cache une frustration. Malgré des heures d’étude, il peine encore à soutenir une conversation fluide. Cette discordance entre l’effort fourni et la performance réelle alourdit la charge mentale et nourrit l’idée qu’il n’avance plus.
L’absence de résultats visibles au quotidien accentue cette tendance. Un apprenant qui ne remarque pas de progrès immédiats dans ses interactions sociales se décourage rapidement. Ce ressenti se traduit par un désengagement progressif de sa part. Il espace ses séances de travail, renonce aux activités complémentaires et se replie sur des automatismes rudimentaires. L’enjeu n’est donc pas de « garder la motivation », mais de rendre perceptibles les avancées invisibles pour éviter cette spirale.
L’impact des différences culturelles sur l’apprentissage du FLE
Apprendre une langue ne se limite pas aux mots et à la grammaire. Chaque langue véhicule une logique sociale qui peut surprendre. Le tutoiement et le vouvoiement en offrent une illustration frappante. Dans des cultures où cette distinction n’existe pas, l’apprenant hésite sur le registre à adopter. Il peut vouvoyer un enfant ou tutoyer un supérieur hiérarchique, créant un malaise qui freine son usage spontané du français.
Les formules de politesse déconcertent aussi. Dire « je vous en prie » ou « avec plaisir » ne correspond pas toujours à un équivalent direct dans d’autres langues. L’étudiant répète mécaniquement sans comprendre le poids social de ces expressions. Cette opacité génère une crainte d’être mal perçu, et parfois même une retenue qui limite la prise de parole.
L’implicite de la conversation française accentue ces écarts. Un locuteur étranger s’attend souvent à une communication explicite. Face à une phrase elliptique ou à une allusion culturelle, il reste silencieux, redoutant une erreur d’interprétation. Cette peur de commettre un impair ne relève pas d’une simple gêne : elle ralentit l’appropriation du français et maintient une distance entre l’apprenant et ses interlocuteurs natifs.
L’intégration de ressources pédagogiques numériques pour surmonter les blocages
Les outils numériques ne remplacent pas un cours, mais ils offrent un soutien précieux lorsqu’ils sont utilisés avec discernement. Une application de reconnaissance vocale, par exemple, aide l’étudiant à s’entraîner sur des sons difficiles, comme le « u » ou les voyelles nasales. En répétant et en recevant un retour immédiat, il affine son oreille et corrige sa prononciation plus rapidement.
Les podcasts et les vidéos constituent un autre appui concret. Ils exposent l’apprenant à une variété d’accents, de rythmes et de registres qui dépassent le cadre de la classe. Cette immersion régulière améliore la compréhension orale et prépare l’étudiant à des situations authentiques. Sans pratique active, cette écoute reste passive et ne garantit pas de progrès durable.
Quant aux plateformes d’échanges linguistiques, elles apportent une dimension interactive. Converser avec un locuteur natif dans un cadre détendu permet de dépasser le blocage de la conversation. L’élève apprend à improviser, à gérer ses erreurs et à gagner en aisance. Ces ressources numériques sont donc complémentaires. Elles renforcent certains points précis, mais elles ne dispensent pas du travail guidé ni de la régularité qu’exige l’apprentissage du français.